Ma nuit chez Maud
Deux hommes, un marxiste et un ingénieur catholique, se retrouvent lors d'une soirée chez Maud et parlent philosophie. L'ingénieur est contraint de passer la nuit chez la jeune femme.
Premier grand succès d’Eric Rohmer, rejoint dans son aventure par des comédiens célèbres, Jean-Louis Trintignant et Françoise Fabian. Troisième des Six contes moraux du réalisateur français, Ma Nuit chez Maud demeure un film calme, gravement ironique, finement équilibré, un morceau d'architecture cinématographique exceptionnellement gracieux dont les proportions élégantes sont d'autant plus séduisantes que leur symétrie ne frappe pas instantanément l'œil.
Même si le thème de Ma nuit chez Maud reste proche des précédents contes moraux (un homme partagé entre deux femmes), le ton que choisit Rohmer tranche avec ses œuvres antérieures : les personnages ont mûri, et leurs préoccupations ne sont plus seulement sentimentales ; elles sont aussi métaphysiques, politiques et religieuses. Le noir et blanc remplace la couleur, en accord avec l'austérité du sujet, des personnages et de la saison. Le narrateur se déclare "catholique pratiquant". Tout l'objet du film sera de confronter ses convictions morales à sa conduite dans le monde, et son hésitation entre Maud et Françoise ne fait que refléter ses propres contradictions. À ce titre, l'opposition entre les deux femmes est parfaitement construite : d'un côté, Maud, femme libre, sensuelle, athée ; de l'autre, Françoise, qui semble incarner la rigueur et l'ascétisme. Deux figures de l'éternel féminin qui posent directement au spectateur le problème de la morale du couple.
Olivier Père, Arte