Augustine

De Alice Winocour
France - 2012 - vost - 101'
Synopsis

Paris, hiver 1885. A l’hôpital de la Pitié Salpêtrière, le professeur Charcot étudie une maladie mystérieuse : l’hystérie. Augustine, 19 ans, devient son cobaye favori, la vedette de ses démonstrations d’hypnose. D’objet d’étude, elle deviendra peu à peu objet de désir.

Entretien avec la réalisatrice dans Vertigo

Critique

(...) Nous sommes en 1885, dans ce Paris saisi en pleine effervescence scientifique, où ce qu’il est d’usage de nommer le progrès avance alors à pas de géant. Depuis toujours, l’homme a été limité par sa connaissance finie du monde qui l’entoure. Voici que l’outil l’enrichit de possibilités nouvelles. On ne refera pas ici toute l’histoire des sciences et des techniques. Signalons juste que nous sommes à dix ans de l’apparition du cinéma, cela n’est peut-être pas indifférent. C’est là où il professe qu’est révéré le professeur Charcot par les meilleurs esprits de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. Charcot, né en 1825, d’origine modeste, en est devenu chef de service en 1862. Il y restera jusqu’à sa mort, en 1893. Il se consacre d’abord aux affections du troisième âge, dont la sclérose en plaques, et à cette maladie dégénérative connue désormais sous le nom de maladie de Charcot. C’est à lui que l’on doit aussi les recherches sur les localisations cérébrales, ainsi que la mise en évidence du rapport entre ces localisations et les atteintes motrices. L’Europe entière vient suivre l’enseignement de Jean-Martin Charcot, l’entendre exposer les cas cliniques de ses patients et les examiner en direct. C’est là aussi que Charcot s’intéresse à l’hystérie et recourt à l’hypnose comme moyen de reproduire expérimentalement la crise hystérique.

Une puissance de jeu étonnante

Il fallait un comédien trempé pour camper un tel personnage. La réalisatrice – élève de la Femis –, dont c’est le premier long métrage, a trouvé en Vincent Lindon un interprète exceptionnel. Corseté dans son costume, il perd le laisser-aller de bon aloi qui dilue souvent son énergie et démontre une puissance de jeu étonnante.

Il le fallait car il est entouré par deux femmes que tout oppose, sinon d’être fortes. L’une est la propre épouse du maître, la grande bourgeoise Constance (Chiara Mastroianni). L’autre est cette Augustine (Soko) qui donne son titre au film, cette pauvre enfant qui, au milieu de milliers d’autres, est recluse dans ce gynécée où elle est victime des attouchements médicaux des hommes. Dans cette étude, la cinéaste est visiblement aux côtés des personnes de son sexe, dans la défense d’une révolte qui, chez ses personnages, ne peut s’exprimer que par le truchement de l’hystérie. Autant le dire tout de suite, tout cela est confondant de rigueur, comme avait pu nous procurer ce sentiment le Saint-Cyr, de Patricia Mazuy, ou A Dangerous Method, de David Cronenberg, dans lequel on retrouve Freud qui fut l’élève de Charcot, pour ne citer que ces deux classiques sur l’interdit charnel et sur son désir de transgression.

Jean Roy, L’Humanité

Projeté dans le cadre de