Massacre à la tronçonneuse
Sur une route du Texas, trois garçons et deux filles en mini-bus prennent un autostoppeur étrange qui leur parle des problèmes des bouchers de la région... Inspiré d’une histoire réelle, Tobe Hooper signe un film-culte qui le rendra célèbre. Mise en scène hachée, filmé caméra à l’épaule, Massacre à la tronçonneuse reste aujourd’hui une œuvre de référence, souvent imitée mais jamais égalée.
Réalisé en 1974, Massacre… n’est finalement sorti en France que le 5 mai 1982. Huit ans de purgatoire pour apprivoiser un film qui, selon l’administration giscardienne, dégage « un vertige de meurtre gratuit et voluptueux où s’exprime de surcroît, à travers la torture puis la mise à mort des victimes, une volonté de puissance à la fois démente et sadique » (1). Face à la déferlante du porno, les censeurs avaient inventé le classement X. Réduire le chef-d’œuvre de Tobe Hooper aux pulsions primales qu’il purge révèle la méconnaissance d’un genre, le gore, encore méprisé par la critique. Plus tard, on comprendra que ce cinéma du cauchemar est le verso d’un american dream survendu à longueur de pellicule par un Hollywood par trop recto. En racontant le calvaire d’une bande d’ados victimes d’une famille d’anciens bouchers texans réduits au chômage, Tobe Hooper a aussi signé un film politique. Moins burlesque que Chaplin, il dénonce aussi les ravages de ces temps modernes propres à déshumaniser l’ouvrier. Par ailleurs, le film est plastiquement splendide, presque expérimental dans l’utilisation de la musique, de la lumière. Et il ravive, avec son ancrage sudiste et son folklore dévoyé, le passé coupable de l’Amérique des origines…
Jérémie Couston, Télérama