L'Événement
France, 1963. Anne, étudiante prometteuse, tombe enceinte. Elle décide d’avorter, prête à tout pour disposer de son corps et de son avenir...
Film coup de poing porté par une actrice en état de grâce. Lorsque Audrey Diwan adapte Annie Ernaux, on n’en sort pas indemne. C’est fort.
Lion d’Or à la Mostra de Venise 2021 !
En lien avec : Une Affaire de femmes
(...) En optant pour le format ramassé 1.37, qui focalise le regard, en plaçant sa caméra toujours à juste distance, et souvent au plus près du visage, de la peau, de la nuque de son actrice ; en structurant son récit tel un compte à rebours, Audrey Diwan réalise un tour de force : rendre organique, concret, palpable ce que représente le fait de mettre fin à une grossesse non désirée (l’impact sur la psyché par la suite mis à part, mais là n’est pas le projet).
Il fallait une femme de cette trempe pour rendre ce parcours de vie universel : Audrey Diwan, par la clarté de sa pensée, son éloquence et son caractère engagé, fait parfois penser à une autre réalisatrice et figure féministe inspirante : Rebecca Zlotowski. L’Événement est un film qui célèbre le désir et le plaisir féminins – et par extension, la créativité naissante chez cette future écrivaine, parvenue à s’extraire de sa classe sociale en sentant naître en elle le goût de l’écriture.
Audrey Diwan ne perd jamais de vue son enjeu : celui de nous faire éprouver, de l’intérieur, ce que vit sa protagoniste. Elle ne cède à aucune afféterie, dépouille ses images, sculpte le relief de ses sons, et fait jaillir ce que le cinéma peut offrir de mieux : la possibilité d’une empathie, pour revenir, à l’issue du générique de fin, à la lumière du jour plus riche et plus ouvert. Il est peu étonnant que des spectateurs tournent de l’œil depuis le début des projections de ce film en avant-premières. L’Événement va bel et bien chercher quelque chose de profond dans nos entrailles. Chez les femmes comme chez les hommes. Et c’est tant mieux : ce film fait le vœu d’un dialogue possible entre les sexes.
Il faut aussi rendre grâce à Anamaria Vartolomei, qui incarne Anne avec un engagement, une présence et une rigueur absolus. Elle est de chaque plan ou presque et accomplit là un travail d’incarnation admirable.
Ce film a obtenu le Lion d’or à la Mostra de Venise. Une récompense juste pour une œuvre qui affronte une douloureuse réalité avec un sens aiguisé du cinéma.
Anne-Claire Cieutat, Bande à Part