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Le propos central de Lindsay Anderson repose sur cette ambiguïté : pour incertaines qu’elles soient, ces images sont malgré tout le symptôme d’un mal-être vis-à-vis de la société, d’un refus net et brutal de ses valeurs. C’est là que se situe la différence avec Zéro de conduite (de Jean Vigo) : pour Lindsay Anderson, l’école n’est pas une miniature innocente et candide de la société, mais bien son calque exact, avec ses compromissions, ses jeux de pouvoir abjects et ses inégalités. Pour lui, la seule issue est donc la lutte armée, la destruction totale des racines – que ce soit dans un fantasme suscité par la frustration et les brimades ou dans les faits importe peu, car la société n’a rien à offrir à ceux qui ne sont pas déjà privilégiés. La chimère éducative n’est qu’un moyen biaisé de perpétuer le status quo, et la révolte ne peut qu’advenir, et advenir dans le sang. L’artiste, car le personnage central de Mick Travis est un double avoué de Lindsay Anderson, se révolte, détruit le monde d’où il vient… et se retrouve seul. La révolte, inévitable, ne peut cependant accoucher que du néant. C’est ce nihilisme désabusé qui échappe à ceux qui relient If…. et mai 1968 : Lindsay Anderson en prophète de la révolte n’est qu’une Cassandre, certes fort perceptive, mais également consciente de la vanité du combat qui s’annonce.
(...) If…., c’est donc un film face à sa légende. Admiré pour cette dernière, le film démérite-t-il si on le replace dans son contexte réel ? Évidemment, non. Critique brillante et ironique de la société anglaise, If…. est un film au propos bien plus universel – autant un document fascinant sur les prémices de la chute qu’une parabole exemplaire, et dont la forme voltairienne devrait inspirer à jamais les satires politiques.
Vincent Avenel, Critikat