GRAINE DE VIOLENCE

De Richard Brooks
Etats-Unis - 1955 - vost - 101' - Noir et Blanc
Synopsis

Richard Dadier, un jeune professeur d'anglais, obtient un poste dans une école d'un quartier défavorisé de New York. Il doit, à sa grande surprise, affronter une classe très dure, qui se désintéresse totalement de son enseignement. Ni la patience, ni l'autorité, qu'il est bientôt obligé d'exercer avec ses poings, ne viennent à bout de la fureur de ces adolescents d'origines et de milieux très différents...

Critique

(…) Nous avons vu que Dadier a la vocation d’enseigner. Il attache à son métier la même valeur et la même importance que l’artiste à son art. C’est autant, sinon davantage, à l’intensité et à la sincérité de cette vocation qu’à ses qualités personnelles, qu’il doit de réussir là où les autres ont échoué. Mais surtout, il est de tous les professeurs de l’école, celui qui a le plus d’expérience de la vie, qui est le plus sensibilisé au monde extérieur (les autres professeurs donnent l’impression de vivre en vase clos, d’avoir un univers restreint aux murs de leur classe et de la salle des professeurs). Dadier pense qu’on peut toujours “intéresser” les élèves, même en ayant recours à des moyens extra-scolaires. On peut, par exemple, essayer de les faire réfléchir sur les bandes illustrées qu’ils ont l’habitude de lire. C’est la même idée qui lui fait organiser la projection du dessin animé ou l’enregistrement au magnétophone. Les élèves participent très volontiers à ces expériences: voilà une illustration concrète des possibilités offertes par les nouvelles directions de la pédagogie. Notons surtout le souci constant chez Dadier de donner aux élèves un enseignement toujours en rapport avec ce qu’ils sont maintenant et avec ce qu’ils sont appelés à faire. Car il est bien évident que c’est d’abord au contenu de l’enseignement qu’il faut penser quand on s’attaque au problème des “méthodes actives”. Dadier parvient à gagner l’estime de ses élèves parce qu’il les estime lui-même. Il ne pense pas, comme ses collègues, que les élèves sont des abrutis, qu’il n’y a rien à en tirer, etc. (…) Le mérite de Graine de violence est de montrer que l’effort, la coopération des hommes peuvent créer une humanité véritable. C’est un film optimiste, qui milite pour l’homme, pour sa libération. Avec Graine de violence, l’humanisme brooksien est né.

Michel Meraud, Image et Son n°90 - Mars 1956 

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(…) Plus qu’une étude sociale, Blackboard Jungle, où Brooks se refuse à porter sur ses personnages un jugement de valeur, et ne se soucie pas d’expliquer des comportements mais bien davantage, de proposer des attitudes en face de situations existantes est avant tout acte de foi dans les vertus du dialogue, et du don de soi. Optimisme béat ? Humanisme hors de saison ? Il me semble que le film a pour mérite de montrer avec une certaine audace pour l’époque, mais sans esprit de racolage un certain nombre de problèmes qui restent aujourd’hui entiers, mais surtout des personnages dont la complexité, la vérité échappent à tout manichéisme.

Louella Interim, Les Cahiers du Cinéma N° 329, Nov 1981 

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Graine de violence est le premier d’une longue série de films consacrés au système éducatif américain. En mettant l’accent sur la criminalité juvénile, il choqua beaucoup aux Etats-Unis où l’on tenta d’empêcher la M.G.M. de le tourner (il fut même interdit en Géorgie où la mixité raciale n’était pas de mise à l’école). La mise en scène de Richard Brooks est d’une efficacité sans faille et Glenn Ford s’affirme dans un rôle difficile, tandis que l’on découvre le talent de Sidney Poitier, le premier acteur noir qui devint vedette. La chanson «Rock Around the Clock», par Bill Haley et ses Comets, a aussi contribué au succès mondial du film.

Gérard Lenne, Revue du Cinéma, 1988