Klute
Tom Gruneman, un savant de renom, a disparu voici six mois. L'enquête de la police et du FBI piétine. Holly, la femme de Tom, qui vit dans la plus grande inquiétude, et Peter Cable, son associé, demandent au détective privé John Klute de se charger de l'affaire et de commencer une enquête à New York. Persuadé que le disparu menait une double vie et qu'il fréquentait Bree Daniels, une prostituée, John Klute décide de prendre contact avec elle. Celle-ci accepte de répondre aux questions du détective, qui apprend ainsi que la jeune femme est harcelée par des appels téléphoniques menaçants. Klute choisit d'explorer cette nouvelle piste...
Film troublant que cette deuxième réalisation de Pakula : le cinéaste part d'une trame de film noir classique pour s'attacher aux vices cachés d'une ville et aux vices revendiqués d'une femme. Enquêtant sur une disparition, Klute, le détective, rencontre Bree, la call-girl. Il lui colle aux cuissardes, d'abord pour l'interroger, puis pour la protéger. En attendant d'être actrice, Bree aime interpréter avec talent les désirs de ses clients en les incitant à s'affranchir de leurs inhibitions. Jusqu'au jour où elle tombe sur un vrai sadique...
Le leitmotiv d'un petit magnéto sur lequel le détective et le criminel écoutent en boucle les propos émancipés de Bree, enregistrés à son insu, donne une ambiance de Watergate en chambre : à sa manière, Klute annonce Les Hommes du président, le film suivant de Pakula. Grâce au travail magnifique du chef op Gordon Willis, New York devient un décor anxiogène dont le clair-obscur suinte la détresse et le danger. Mais la lumière se réchauffe dès qu'il s'agit d'érotiser Bree, femme libérée, prisonnière volontaire de sa liberté. Jane Fonda (oscar pour ce rôle) est littéralement électrique, alternant rage et paranoïa. Il faut redécouvrir ce polar sensuel, et politique par la bande.
Guillemette Odicino, Télérama