Rocco et ses frères
Fuyant la misère, Rosaria et ses quatre fils quittent l'Italie du Sud pour Milan où vit déjà l'aîné, Vincenzo. Chacun tente de s'en sortir à sa façon. Mais l'harmonie familiale est rapidement brisée : Rocco et Simone sont tous les deux amoureux d'une jeune prostituée, Nadia.
Grand Prix du jury à la Mostra de Venise en 1960, Rocco et ses frères scelle la rencontre de Visconti avec le duo Alain Delon-Claudia Cardinale. À travers les méandres de ce sublime film-fleuve, le réalisateur expose toute une conception de la condition humaine et du prolétariat italien.
Luchino Visconti s'est essayé à l'allégorie engagée, juste après Les Nuits blanches et peu de temps avant Le Guépard. Du premier, il reste la solitude passionnée des âmes blessées et la photogénie féerique de la neige. Comme dans le second, le cinéaste démêle avec patience les liens familiaux et s'attarde sur leur flamboiement salutaire.
Au fil d'un récit d'une complexité extrême, il réussit à dénoncer une réalité historique tout en traquant ses effets sur les individus. Les personnages ont trouvé un moyen infaillible pour exister : grâce à la prostitution et à la boxe, leur corps devient roi. Pour peindre le désarroi de cette communauté en exil, Luchino Visconti a fait appel à des acteurs étrangers. Parmi eux, deux jeunes Français : Alain Delon et Annie Girardot, dont la fragilité décalée de débutants adoucit cette brûlante tragédie antique.
Marine Landrot, Télérama