Lost Country
"Lost Country, dès son titre désabusé et atemporel, n’affirme ainsi rien d’autre que l’actualité d’une perte, dont la fiction qu’il déploie est le marqueur et l’origine. Convainc, dès les premières secondes, la réussite de l’évocation historique : la mise en scène millimétrée et fiévreuse de Perišić chronique finement la Serbie déroutée et totalitaire de ses vingt ans, au moment où Milosevic et les nationalistes confisquent le résultat des élections municipales de 1996 et répriment violemment les révoltes étudiantes qui s’ensuivent. Belle réussite du scénario – cosigné par Alice Winocour, la réalisatrice de REVOIR PARIS –, un dilemme intime déchirant invite à la métaphore, lorsque Stefan, 15 ans, se trouve écrasé, jusqu’au martyre, entre son engagement militant et la fidélité à sa mère, intellectuelle dont il pressent très tôt le mensonge du discours politique (elle est porte-parole du régime) et l’ambivalence aimante des propos protecteurs (« c’est pour toi que je fais cela »). C’est évidemment de cette encombrante sincérité que se nourrit la tragédie."
Les Cahiers du cinéma