The Misfits
Roslyn Taber vient de divorcer de son mari Raymond. Pour fêter l'événement, elle se rend dans un bar, à Reno, avec Guido dont elle a fait la connaissance. lIs y retrouvent Gay Langland, un cow-boy vieillissant dont s'éprend Roslyn. Gay et Roslyn partent vivre dans un ranch…
(…) Dans The Misfits, il y a un plan, dès les premières minutes, impensable du temps où Huston se satisfaisait de séquences impeccablement filées, un plan que n’aurait pas désavoué Bonnard : Marilyn, sur fond de lune, improvise devant I'arbre de vie, symbole inévitable, quelques pas d’une danse lascive. Eli Wallach, qui la devine ivre, souhaiterait y mettre un terme, mais Gable, que la maladie ronge, l’en empêche, car il veut voir. Eh bien métaphoriquement parlant, Wallach, c’est le producteur chargé d’aller à l’efficace, et Gable, c’est Huston qui prend son temps et en savoure chaque instant. Plus qu’aucun autre film, The Misfits se présente comme un document ethnologique sur la mort au travail, sur la disparition des races condamnées par l’Économie, cow-boys et chevaux sauvages. Races qui s’affrontent et se détruisent, alors qu’elles sont solidaires, ainsi que le hurle dans le petit matin glacé du Nevada, cet autre papillon des temps futurs, la suicidaire Marilyn Monroe. Crépusculaire, The Misfits, tourné volontairement en noir et blanc, les couleurs du deuil, démontre que quiconque, aurait-il en face les intouchables monstres sacrés, interpelle son propre malheur, ne peut que s’élever au plus haut de la douleur, là où Montgomery Clift, archange au nez cassé, peut enfin baisser la garde, tomber le masque, et attendre, avec sérénité, le verdict. “Que faites-vous dans l’existence ?”, demande, non sans calcul, Marilyn à peine divorcée et déjà en quête d’un compagnon. Et Gable, quise doute qu’on ne lui repassera pas deux fois le plat, répond, comme Huston le fera désormais : “Oh, je vis !” (…)
Gérard Guégan, Dictionnaire du Cinéma