Maternité éternelle
Dans les années 50 à Hokkaido, au Japon. Fumiko, mariée et mère de deux enfants, passe des heures entières dans un club de poésie pour fuir ses problèmes de couple. Là-bas, elle sympathise avec Takashi, époux d'une de ses amies, Kinuko. Les deux partagent la même passion des lettres et s'adonnent au même passe-temps : écrire des poèmes. Alors qu'elle parvient à attiser la curiosité d'un éditeur prêt à publier ses textes, Fumiko découvre parallèlement avec stupeur qu'elle est atteinte d'une grave maladie. Alitée à l'hôpital, elle reçoit la visite d'un journaliste venu l'interroger suite au succès des parutions de la jeune femme...
L’univers de Fumiko est réduit à un lit et quelques objets, dont une boîte à musique offerte jadis par M. Hori. Bien que parfois un peu chargé (notamment dans les derniers instants avec les enfants), le mélodrame trouve sa plus belle expression dans la relation qui rapproche Fumiko et Akira Otsuki, critique littéraire. Elle croit d’abord qu’il s’intéresse à son cas, convertissant sa maladie en argument de promotion. En quelques scènes magistrales, Tanaka transforme la chambre d’hôpital de geôle – en témoigne sa fenêtre grillagée – en nid d’amour d’autant plus pur qu’il est sans horizon. Elle multiplie les plans à la beauté stupéfiante, transformant une bassine en auréole, jouant des ombres et des contrastes à merveille pour exprimer espoir et résignation.
Capricieuse, égoïste ou mauvaise, les qualificatifs dépréciatifs sont balayés face à la dignité de Fumiko qui, malgré son corps mutilé, accepte de vivre une dernière passion. Si Maternité éternelle se conclut dans une emphase mélodramatique, le film marque surtout par sa liberté de ton et sa capacité à transcrire, au travers d’images d’une modernité inouïe, une trajectoire d’émancipation féminine dans le Japon d’après guerre.
François-Xavier Thuaud, le Bleu du Miroir