Bergman Island
Un couple de cinéastes s'installe pour écrire, le temps d'un été, sur l’île suédoise de Fårö, où vécut Bergman. A mesure que leurs scénarios respectifs avancent, et au contact des paysages sauvages de l’île, la frontière entre fiction et réalité se brouille…
Rions, un peu, avec Ingmar Bergman, puis, redevenus graves, rendons-lui hommage. Dansons sur la tombe d’un amour qui n’a pas encore fini de bouger, écrivons son épitaphe. Découvrons le passage du Nord-Ouest entre la vie et la fiction. Examinons ce qui sépare les femmes des hommes au moment de créer une œuvre d’art. Le cahier de devoirs de vacances de Mia Hansen-Love offre un programme chargé. Pourtant, quand on le referme, au bout des presque deux heures de projection de Bergman Island, c’est le goût des vacances qui reste en bouche, pas celui des devoirs.
Des clients rêvés pour l’expérience Farö, donc, à la fois émerveillés et effrayés de se voir attribuer pour résidence la maison ou furent tournées les Scènes de la vie conjugale, discutant des heures durant pour savoir s’il faut prendre la chose comme un gag ou comme un présage. Les premières séquences de Bergman Island flirtent éhontément avec la comédie – ce qui n’est guère dans les habitudes de la cinéaste. Mia Hansen-Love filme le lieu avec amour, mais sans aucune révérence. Les interminables crépuscules sont occupés par des conversations un peu oiseuses, un peu profondes, autour de la figure totémique de Bergman, sa vie (mauvais père, mauvais compagnon), son œuvre (emplie de l’absence de Dieu, désespérée – mais alors où caser Fanny et Alexandre ?).
La journée, on peut prendre un bus et partir pour un safari Bergman. C’est ce que fait Tony pendant que Chris fait l’école buissonnière, préférant se lancer au hasard, en compagnie d’un jeune artiste croisé dans la vidéothèque du grand homme (outre une œuvre imposante, Ingmar Bergman a laissé une impressionnante collection de VHS).
Thomas Sotinel, Le Monde