La Cicala
Ex-prostituée et chanteuse sur le déclin, Wilma Malinverni arrive sans cérémonie dans le bar où elle doit se produire. Tout de suite, elle se lie d'amitié avec la Cigala, une jeune et ravissante serveuse. Et, après " le four "de la chanteuse, les deux femmes partent ensemble…
Lattuada poursuit, ici, comme dans La Bambina ou La Fille, sa quête de l'hédonisme et de la célébration des beautés adolescentes. Mais, contrairement à ces deux films, l'opposition n'est plus à chercher entre l'homme mûr et la jeune fille mais entre une femme de quarante ans et sa fille. Autant dire que le champ «voyeuriste» de Lattuada s'en trouve élargi : la séduction de Wilma, de Severina et de la Cigala opèrent des coupes bien délimitées dans notre inconscient. Le charme mature, un brin inquiet et farouche de la mère, s'oppose à celui, arrogant et destructeur de sa fille, les deux étant équilibrés par celui, calme et généreux, de la Cicala. Le spectateur n'a plus besoin, dans ce film, d'alter ego de réfracter son désir: la palette des séductions féminines ébauche un grand nombre de compositions aptes à satisfaire tous les goûts. Des conventions mélodramatiques avouées, une matière de transcender fantasmatique soigneusement entretenu, un génie pour mettre en situation les plastiques des femmes contribuent à faire de Lattuada le véritable cinéaste de l'obsession, et La Cicala, un film que les connaisseurs apprécieront.
Raphaël Bassan, La Revue du Cinéma