Demain est un autre jour
Dans Demain est un autre jour - une femme, Norma Vail (Stanwyck), retrouve vingt ans après un homme aimé dans sa jeunesse, Clifford Groves (Fred MacMurray), désormais marié et père de famille, Sirk décline la thématique du retour à l’aune du renoncement (à l’amour) que l’ordre moral, incarné ici par les figures inquisitrices des enfants soupçonneux de Cliff, impose. Le cinéaste prend ainsi le parti singulier d’aborder le récit du point de vue de son héros masculin, petit fabriquant de jouets débonnaire dont on devine la solitude au sein d’une famille qui ne fait pas grand cas de lui. Famille qui s’apparente à un tombeau, et dont l’arrivée inopinée de Norma dans sa vie laissera entrevoir une porte de sortie, sans que Cliff ne parvienne à s’en échapper, muselé par le poids du devoir et l’égoïsme de ses enfants. À travers les renoncements des deux amants, c’est à la fois le carcan d’une société castratrice et l’impossibilité d’abolir d’un trait vingt ans d’une vie que Sirk dessine dans un finale déchirant.
Nathalie Dray, Libération