Vol au-dessus d'un nid de coucou
Afin d’échapper à la prison, Randle McMurphy simule la folie et se fait interner. Devenu populaire auprès des patients grâce à sa joie de vivre et son insolence, il prend la tête d’une rébellion...
Produit par Michael Douglas, Milos Forman porte une charge aussi violente que salutaire contre le système des asiles d’aliénés. Jack Nicholson et Louise Fletcher s’affrontent dans un duel impitoyable. Cinq Oscars majeurs !
(...) Vol au-dessus d'un nid de coucou parvenait à se jouer de tout le monde et brouillait toutes les pistes. D'abord en falsifiant le film de genre : l'asile d'aliénés n'est qu'un prétexte, ou plutôt une déclinaison. On est ici autant en plein film de prison que sur les terres du western, avec des personnages codés s'opposant en un long duel. McMurphy (Nicholson) a tout du cowboy renégat, nourri à l'instinct. Miss Ratched (la méconnue Louise Fletcher), l'infirmière/matonne, est un shérif chargé de faire respecter l'ordre dans sa communauté. Il y a même un Indien, véritable fil rouge de la dramaturgie et finalement héros du film lorsque le meurtre rituel final lui permet de retrouver la liberté et les terres de ses aïeux (le choix de l'Oregon, terre mythique du western, pour lieu de tournage ne peut pas être innocent).
Par ailleurs, Forman fait de Vol au-dessus... une allégorie du système sociopolitique des pays de l'Est : autant que les méthodes psychiatriques, c'est surtout une société répressive qui est ici épluchée, un système oppressif appelant à une inquiétante normalisation qui est pointé du doigt et contre lequel il faut lutter. Ce que fait McMurphy avec une ironie amère, quand à chaque retour de séance d'électrochocs il pose la question : "Je voudrais savoir pourquoi on ne m'a pas prévenu que ma liberté dépendait de votre bon vouloir." Vision renforcée par une photographie qui passe son temps à chasser les couleurs, tendant vers un noir et blanc peu coutumier dans les productions hollywoodiennes du début des années 70.
Alex Masson, Les Inrocks