Hyènes

De Djibril Diop Mambéty
Suisse, Sénégal - 1992 - vost - 110' - Couleurs - Numérique
Synopsis

Des griots annoncent à la population de Colobane, petite cite du Sahel, une incroyable nouvelle, le retour au pays de Linguere Ramatou devenue multi-millionnaire. Au cours d'un grand banquet, Linguere annonce son intention de donner 100 milliards à la ville. Mais en contrepartie elle demande la mort de Draman, son amant d'antan…

Critique

Tournant peu (une foi tous les vingt ans!), Djibril Diop Mambety tente – avec succès – de confronter des éléments de culture africaine à des thèmes ou à des modes d'expression étrangers, sans jamais tomber dans le décalque de formes déjà existantes. Dans Touki Bouki (1973), son précédent film, il mettait à mal un certain nombre d'idées reçues sur la famille, le sexe, en bâtissant un véritable road movie à l'africaine, adaptant les codes du «genre» au contexte local. Dans Hyènes, le cinéaste mélange des éléments tirés d'une pièce de Friedrich Dürrenmatt à des souvenirs personnels liés à la vision d'une prostituée hautaine qui l'obséda durablement pour qu'il envisage, dans un premier temps, de lui consacrer une biographie romancée. Cet apologue, tournant autour du destin d'une vieille femme spoliée de ses droits élémentaires dans sa jeunesse et qui réclame vengeance du haut de sa fortune, s'applique parfaitement à l'Afrique contemporaine qui vit, depuis trente ans, le retour de nombreux refoulés: néocolonialisme, désir d'imiter l'Occident tout en regrettant la perte des anciennes valeurs communautaires… Le personnage de Linguère Ramatou synthétise toutes ces contradictions dans une forme qui est plus symbolique que naturaliste.

Raphaël Bassan, La Saison 1993