23 Mai 2025

Variety

de Bette Gordon (1983) - Cinéclub NOCTURAMA vendredi 23 mai à 21H00!

VARIETY de Bette Gordon (1983) - Cinéclub NOCTURAMA vendredi 23 mai à 21H00!

Version restaurée 2K !

New York, 1983. Christine cherche désespérément du travail et finit par se faire engager comme ouvreuse dans un cinéma porno de Times Square. Elle devient peu à peu obsédée par les sons et les images des films qui l’entourent. Puis, fascinée par un des spectateurs, un homme d’affaires du nom de Louie, Christine commence à le suivre...

Variety est le premier long-métrage de Bette Gordon, née en 1955, cinéaste et professeure à l’Université de Colombia. Figure du cinéma américain indépendant, expérimental et avant-gardiste, elle avait déjà abordé les thèmes de la sexualité, de la violence et de la pornographie dans ses courts-métrages. En réalisant ce film, elle souhaite entrer en conflit avec les mouvements appelant à l’interdiction de la pornographie aux États-Unis, et questionner ce qu’elle représente, notamment pour les femmes. « J’aime observer. J’ai toujours été fascinée par le cinéma et le plaisir secret, proche du voyeurisme, que je ressens en voyant des gens sur un écran. Puisque le principe de base du cinéma est à la fois de voir et d’être vu (le voyeurisme et son aspect malsain, l’exhibitionnisme), j’ai voulu faire un film qui abordait ces aspects. » -Bette Gordon.

Pour incarner le personnage complexe de Christine, la cinéaste recherche une héroïne hitchcockienne, blonde et froide, mais avec quelque chose de différent. Cette fois-ci, elle ne sera pas soumise aux fantasmes masculins : c’est elle qui deviendra voyeuse, obsédée par son désir. Bette Gordon transforme alors l’homme “sujet regardant” en “objet regardé” et inverse des rôles très normés. Ainsi, ce film-concept, qui rappelle le travail audacieux de l’artiste Sophie Calle et l’esthétique de Nan Goldin – qui joue d’ailleurs dans le film et en fut la photographe de plateau –, se révèle être un objet cinématographique intrigant et fascinant.

"J’aime regarder. J’ai toujours été fascinée par le cinéma et par ce plaisir secret d’observer des gens à l’écran. Puisque la condition élémentaire du cinéma est un échange entre voir et être vu (entre voyeurisme et exhibitionnisme), j’ai voulu faire un film qui aborde cette dualité. Dans Variety, Christine travaille dans un cinéma porno comme caissière. Le film se positionne du côté du voyeur, sauf que dans ce cas, le rôle qui incombe habituellement à l’homme est inversé. Christine devient obsédée par un client qu’elle regarde d’abord, puis qu’elle commence à suivre. Son obsession est, quelque part, pornographique. Hitchcock a déjà utilisé la figure de la « femme blonde », mais toujours comme un objet fantasque du regard masculin. Christine usurpe ce rôle. Elle devient la détective dans un thriller où le territoire est façonné par le langage du désir."
-Bette Gordon, 1984

"Variety demeure l’un des meilleurs représentants de la « no wave » new-yorkaise des années 80, aux côtés des premiers films de Jim Jarmusch. L’histoire d’une jeune femme, ouvreuse d’un cinéma porno dans l’univers des peep-shows et des salles X dissimule un hommage au film noir. Bette Gordon choisit de confier à son personnage féminin le rôle moteur de la voyeuse, obsédée par un client énigmatique qui pourrait bien être un gangster. La réalisatrice s’inspire à la fois des films new-yorkais des années 50 de Fuller ou Dassin et du cinéma moderne européen. Son héroïne, confrontée au monde très masculin de la pornographie, explore son propre désir, sans aucun jugement moralisateur. Bette Gordon procède à une inversion des rôles puisque c’est la femme qui entreprend une enquête à la manière d’un détective, tandis que l’homme devient objet de mystère et de fascination. Du point de vue de la mise en scène, on pense moins à Taxi Driver, malgré la similitude de certains lieux de tournage, qu’à Rivette ou Antonioni. Le choix de la non-résolution finale, d’une conclusion abandonnée au vide et à l’absence inscrit Variety dans un héritage moderniste. Le film affiche également sa proximité avec le travail photographique de Nan Goldin, qui tient un petit rôle de barmaid. Variety se révèle un fascinant portrait de femme doublé d’un tableau des quartiers louches de New York, avec une appréhension féministe d’un sujet qui ne sombre jamais dans le sordide malgré le contexte.

Le film avait été repéré à la Quinzaine des réalisateurs en 1984, avant de sombrer dans l’oubli. Il réapparait enfin dans une belle version restaurée et c’est une excellente nouvelle."
-Olivier Père, Arte

Programmation

Vendredi 23.5