22 Mai 2025

Séance spéciale de THE LANDSCAPE AND THE FURY

jeudi 22 mai à 20H00 en présence de la réalisatrice Nicole Vögele !

Séance spéciale de THE LANDSCAPE AND THE FURY jeudi 22 mai à 20H00 en présence de la réalisatrice Nicole Vögele !

Une lande désolée, comme on se l’imagine dans les contes. Nous sommes à la frontière bosno-croate, lardée de cicatrices des guerres des années 90. Ce bout d’Europe, triste et gris, est arpenté par celles et ceux qui fuient les lointains conflits d’aujourd’hui en quête d’un refuge, mais aussi par celles et ceux que la guerre des Balkans a jetés là. Un film sans concession, kaléidoscope de paysages ravagés par des fureurs devenues silencieuses.

  • Visions du Réel 2024 – Grand Prix
  • Doc Alliance Prague 2024 – Meilleur Film
  • European Film Awards – Nomination Documentaire
  • Locarno Film Festival 2024 – Panorama Suisse

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"The Landscape and the Fury s’ouvre par un souffle ; le chemin parcouru de nuit, dans les bois, pourrait ressembler à une filature. Pourtant, il n’est nullement question de cinéma de genre dans le documentaire de la Suissesse Nicole Vögele, qui dépeint l’urgence bien réelle de migrant.e.s traversant cette région du nord-ouest de la Bosnie-Herzégovine, à la frontière de la Croatie et donc aux portes de l’espace Shengen. Les personnes comptent les heures passées à marcher, et la nuit noire est parfois péniblement éclairée par quelques lampadaires jetant une faible lumière sur un chemin inquiétant.

Très tôt dans cet impressionnant long métrage (dévoilé en compétition au Festival Visions du Réel), Nicole Vögele filme une mer d’arbres. La forêt semble à première vue paisible, il y a même parfois quelques plans qui rendent compte du caractère bucolique des lieux. Mais le décor est rapidement rendu lugubre par les traces humaines laissées ici ou là. C’est un bout de semelle figé dans la boue, ce sont les débris d’un Nokia incrustés dans le sol, des vêtements éparpillés au bord de la rivière, des photos d’identité abimées parmi les feuilles d’arbres : autant d’indices suggérant des situations dramatiques et des lieux abandonnés (vidés ?) dans l’urgence.

« C’est la Bosnie ? » se demande l’une des personnes filmées par Vögele. Les espaces, abstraits, finissent par se superposer – tout comme les temporalités. On croise un tank abandonné qui appartient à un autre conflit. Dans le sol sont encore dissimulées les mines d’il y a trois décennies, et qu’on tente laborieusement de neutraliser. The Landscape and the Fury est un film sur le temps : ce sont certes les saisons qui passent à l’écran, mais ce sont surtout les conflits d’aujourd’hui qui se superposent sur ceux d’hier, dans les lieux hantés sur lesquels s’attarde la caméra de la cinéaste.

Il n’y a pas de commentaire didactique dans The Landscape and the Fury. La plupart des protagonistes sont filmés à distance, la majorité des témoignages sont simplement des discussions captées au loin. Tout juste entend-on que certains espèrent atteindre la Belgique, d’autres l’Angleterre. Plus tard un homme se souvient des atrocités inconcevables de la guerre de Yougoslavie et des traces indélébiles laissées dans les âmes. Comment apprendre à vivre avec, à l’époque et encore aujourd’hui ? Dans le film, des hurlements glaçants au cœur de la nuit finissent par être avalés par l’obscurité. « Est-ce qu’il nous suit toujours ? » s’inquiète une femme sans qu’on ne sache précisément de quelle menace il s’agit. Qu’est-ce qui, de décennie en décennie, poursuit les survivant.e.s d’hier et les fugitif·ve·s d’aujourd’hui ?"
-Nicolas Bardot, Le Polyester