19 Septembre 2024

Hommage à Gena Rowlands (1930-2024)

jeudi 19 septembre à 19H30 avec OPENING NIGHT de John Cassavetes en présence de la critique Murielle Joudet !

Hommage à Gena Rowlands (1930-2024) jeudi 19 septembre à 19H30 avec OPENING NIGHT de John Cassavetes en présence de la critique Murielle Joudet et en partenariat avec l'Association des Amis des Cinémas du Grütli !

Après une représentation, la comédienne Myrtle Gordon assiste à la mort accidentelle d'une admiratrice. Elle se noie dans le whisky, bouleversée par ce décès, alors qu'elle doit justement incarner le rôle d'une femme désespérée.

Murielle Joudet est critique de cinéma dans la presse papier (Le Monde, Les Inrocks), à la radio (La Critique, France Culture ; Le Masque et la Plume, France Inter), à la télévision (Le Cercle, Canal+) et participe régulièrement au podcast Sortie de secours. Elle anime depuis huit ans "Dans le film", une émission d'entretiens sur le cinéma pour le site hors-serie.net. Elle est l’auteure de deux essais : Isabelle Huppert. Vivre ne nous regarde pas (2018) et Gena Rowlands. On aurait dû dormir (2020, prix du meilleur livre de cinéma décerné par le CNC en 2021) aux éditions Capricci, et La Seconde Femme. Ce que les actrices font à la vieillesse aux éditions Premier Parrallèle (2022) et a co-signé l’ouvrage Alfred Hitchcock. La Totale (2019, E/P/A éditions).

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Murielle Joudet, Le Monde, 15 août 2024

"Gena Rowlands, interprète de toutes les nuances de l’expérience féminine.

Au cinéma, l’actrice, morte le 14 août à l’âge de 94 ans, avait notamment joué dans « Une femme sous influence », « Gloria » ou « Streams », du réalisateur et acteur John Cassavetes, avec lequel elle formait un couple qui alliait l’art et l’amour.

Il suffit d’évoquer le nom de Gena Rowlands pour voir le visage des actrices, comédiennes, mais aussi peut-être de toutes les femmes subitement s’illuminer. Cela traduit bien plus qu’une immense admiration pour son travail : une compréhension profonde, intime, de ce que faisait cette femme, de la manière dont, justement, elle nous représentait toutes. Gena Rowlands, morte mercredi 14 août, à son domicile d’Indian Wells (Californie) des suites de la maladie d’Alzheimer, à l’âge de 94 ans, était un peu plus qu’une artiste qui révolutionnait son art. Elle semblait avoir parcouru tout le nuancier de l’expérience féminine, avec un goût prononcé pour les échecs plutôt que les victoires. Ses plus grands rôles racontent l’histoire d’une femme épuisée, incomprise, folle, angoissée à l’idée de vieillir, aimante, mais aimant mal, seule à en pleurer. C’est peut-être, pour une actrice, le seul territoire à parcourir, le seul spectacle à jouer : celui de la fatigue des femmes.

(...)"

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GENA ROWLANDS. ON AURAIT DÛ DORMIR (Editions Capricci, 2020)

Gena Rowlands habite deux mondes : celui des films de John Cassavetes, et celui, plus méconnu et presque antagonique, de la télévision américaine dont elle fut une présence familière depuis les années 1950. Ce livre retrace sa carrière, explore son jeu ébréché, raconte une vie d’actrice à la manière d’un roman à plusieurs strates.

C’est le roman d’un décor, celui de l’Amérique d’après-guerre et des événements qui la traversent : la construction des banlieues résidentielles, l’aliénation des femmes au foyer, les classes moyennes, la puissance normative de la télévision, le conformisme social.

C’est aussi le roman d’un couple qui, face à ce décor, en a construit un autre, un havre où résister et faire exister ses obsessions. Rowlands et Cassavetes se sont épuisés à réconcilier ce qui, spontanément, est dissocié : l’intransigeance artistique et l’industrie, la vie affective et les tournages, la poursuite du bonheur et une lucidité implacable, la maison et le monde.

C’est, enfin, le roman d’une actrice qui a consacré son art à raconter une autre histoire des femmes où l’échec est plus transmissible que les victoires. Film après film, Gena Rowlands n’a cessé de creuser des tunnels, d’installer des scènes pour jouer le grand spectacle fatigué de la féminité.