Rambo: First Blood
Rambo, First Blood est une œuvre phare des années 80. De plus, sur le plan idéologique, ce premier Rambo n’a absolument rien à voir avec ses séquelles ; il s’agit même de leur exact contraire. Tandis que ce premier volet stymatise les travers d’une Amérique au cœur noir, les trois autres, véritables machines de propagande gouvernementale, en exaltent les credos surannés : «Amérique gendarme du monde», anticommunisme primaire, ultra racisme, apologie de la violence, des armes et de l’autodéfense. A l’origine du film de Ted Kotcheff, il y a un roman : «First Blood», «Premier sang», de David Morrell.Publié en 1972, alors que la guerre du Vietnam n’était pas encore terminée, Morrell raconte l’histoire de l’affrontement sans merci entre un jeune homme traumatisé, apparemment sans histoires, et le teigneux shériff d’une petite bourgade du centre des Etats-Unis. Ce dernier ne veut pas de clochard dans son fief et décide de le boucler. Il s’avère toutefois que le jeune homme est un vétéran des forces spéciales de retour du Vietnam, et qu’il n’entend pas se laissser traiter ainsi. Il s’enfuit non sans avoir commis des dégâts. Avec ce roman, David Morrell fait œuvre de précurseur. Il entame une sorte de psychanalyse de l’Amérique et de ses démons. La voie ouverte par Morrell et consorts deviendra bien vite un boulevard abondemment fréquenté, dans la littérature comme dans le cinéma.C’est donc ce Rambo que met en scène Ted Kotcheff. Dans l’Amérique de Ronald Reagan, son œuvre est quasi subversive. Il s’attache au sort des vétérans des sales guerres. Pour incarner John Rambo, il engage la super star du moment, Sylvester Stallone, qui vient d’aligner trois volets de Rocky, et pour le shérif, l’immense Brian Dennehy, qui, bien qu’ayant déjà croisé Stallone dans Fist (Norman Jewison, 1978), n’en avait pas la célébrité. D’ailleurs, à partir de ce film Brian Dennehy tournera de plus en plus, dans des rôles de plus en plus importants, avant de crever l’écran dans Le Ventre de l’Architecte, de Peter Greenaway (1987). Rambo, First Blood reste un film formidable. Et nous vous invitons à le redécouvrir.
Alfio Di Guardo
> "Ted Kotcheff a failli tuer Rambo (et on ne lui en veut pas)" extrait de Tracks arte.tv